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Robert Injey

Blog personnel sur l'actualité politique à Nice et en France

Nice 2026: Quels scénarios possibles?

Publié le 29 Février 2024 par injey06

Nice 2026: Quels scénarios possibles?

L’actualité niçoise vit au rythme des déclarations et des lubies d’un maire dont l'ambition est «d’offrir aux actionnaires les opportunités d’investissements», sans être très regardant sur l’impact à terme de ceux-ci. La seule préoccupation de C. Estrosi  c’est de rendre la «ville attractive». Attractive pour les actionnaires et ce tourisme des hyper-riches, cible d’une économie qui n’envisage l’avenir que dans une fuite en avant pour livrer la ville aux promoteurs. 

Une fuite en avant qui ne s'embarrasse pas du quotidien de celles et ceux qui vivent et  travaillent  à Nice.  Ainsi l’Etat vient de prononcer le carencement pour les logements sociaux, alors que, sous la pression des professionnels de l’immobilier, C. Estrosi refuse d’encadrer les loyers. Deux décisions qui illustrent une logique mortifère pour la population niçoise. 

La traduction immédiate des choix politiques que nous impose Christian Estrosi, c’est une ville qui subit de plein fouet la ségrégation urbaine. Une ville qui se vide, peu à peu, de ses habitants des couches populaires (1), mais aussi des couches moyennes qui ne peuvent suivre financièrement la spirale sans fin du coût du logement. Catastrophiques sur le plan social, ces choix le sont aussi face aux défis que nous impose le dérèglement climatique. Deux exemples parmi bien d’autres: un aéroport en zone inondable et qui risque fort d’être sous les eaux dans quelques décennies, un fleuve comme le Paillon dont on se refuse encore à envisager sérieusement que demain il puisse dévaster une partie de la ville (2) 

Aujourd’hui la ville, et au-delà la Métropole, sont gérées à courte vue. «Après nous le déluge»  (3) est de fait la philosophie de ceux qui sont aux commandes de la Métropole Nice Côte d’Azur. 

Cette situation n’a que trop duré et nombreux sont celles et ceux qui voudraient tourner la page de cet avatar du médecinisme. 

A deux ans des échéances municipales, où en sommes-nous? Est-il possible de faire prévaloir d’autres choix ? Petit tour d’horizon:

Estrosi en campagne

D'abord évitons de croire, comme pourraient le laisser penser certains,  que nous assistons à une fin de règne. La multiplication des affaires qui trouvent des prolongements devant la justice (4) pourrait donner l’impression de revivre la fin de l‘ère Jacques Médecin. L’histoire bégaye, mais ne se répète pas. 

A deux ans du scrutin, Christian Estrosi  n’envisage pas de laisser sa place. Ces derniers mois, il a resserré son dispositif avec plusieurs nominations qui illustrent sa volonté d’accrocher un nouveau mandat. Un exemple:  l'arrivée dans le cabinet du maire d'Olivier Bettati. Tout un symbole, l'ancien proche d’Eric Ciotti est le seul à avoir battu C. Estrosi lors d’une élection. Sa «brouille» avec Eric Ciotti est profonde, son retour dans l'entourage de C. Estrosi est un atout majeur, c’est un des rares dans cet entourage à avoir un véritable savoir-faire électoral et des réseaux.  

Dans les deux ans à venir, Christian Estrosi va beaucoup miser sur l’extension de la coulée verte, avec la forêt urbaine en lieu et place d’Acropolis et du théâtre. En 2020 la première partie de la coulée verte fut  la réalisation la plus plébiscitée par les Niçoises et les Niçois. Il espère renouveler l’opération d’ici 2026 avec cette «saison 2» de la promenade du Paillon  qui devrait donner lieu à au moins 4 inaugurations étalées jusqu'aux municipales (5) .  

Est-ce que cela suffit pour faire oublier le reste ? Les procédures judiciaires en cours? Les finances de la Métropole qui sont dans le rouge?  Le vécu difficile d’une population qui, pour 20% d’entre-elle, vit sous le seuil de pauvreté ? Aura-t-il face à lui des oppositions éclatées ou rassemblées ? Beaucoup d’inconnues à cet instant. 

Ciotti va-t-il  refuser d’y aller comme en 2020 ?

Il s'affiche comme le principal opposant à C. Estrosi, ne rate jamais une occasion pour marquer sa différence et pointer les difficultés de la Métropole. Il ne cesse d’affirmer son ambition, mais comme en 2020 la même question se pose: Éric Ciotti osera-t-il affronter Christian Estrosi pour l'élection municipale? Certains avancent qu’il n’a pas eu besoin d’Estrosi pour se faire élire député, il le fut même contre un candidat soutenu par le maire de Nice. 

Mais en 2022, comme en 2017, Eric Ciotti a largement profité de la bienveillance de l’extrême droite qui, en 2022,  lui a opposé une candidate totalement fantomatique, après celle assez caricaturale de 2017. 

La donne en 2026 sera très différente pour Éric Ciotti. Pour les municipales il sera confronté sur sa droite à la présence de Philippe Vardon et, peut-être,  de Benoît Kandel, qui sont  tout sauf des candidats virtuels. La présence effective et non plus fictive  de l’extrême droite aux municipales réduit grandement l'espace pour Eric Ciotti.  La perspective d’être battu n’est pas envisageable pour celui qui rêve d’un destin national. Comment retomber sur ses pattes sans donner l’impression de battre en retraite ? Eric Ciotti est une nouvelle fois confronté à la même question qu’en 2020: faut-il y aller ? 

Ou bien faire le choix du pire ? 

Il reste une autre option à Eric Ciotti, celle du pire. Celle d’aller au bout de la logique qui, depuis des années, le pousse à reprendre les thèses de l’extrême droite, en s’alliant avec celle-ci. La dérive des Républicains vers  l’extrême droite n’est pas nouvelle. Coincé entre un Macron qui fait et assume une politique de droite et une Marine Le Pen qui joue la carte de la dédiabolisation, l’espace de LR ne cesse de se réduire. Le score de Valérie Pécresse à la présidentielle, les intentions de vote pour les élections européennes, jamais données au-dessus de 8% depuis plus de deux mois pour LR, illustrent un profond remodelage de la vie politique.  Eric Ciotti, d’une manière ou d’une autre, au premier ou au second tour, franchira-t-il cette ligne rouge ? Hier totalement improbable, cette hypothèse n’est pas à exclure.  En politique, le pire est toujours possible.

A gauche: se rassembler pour pouvoir peser

A gauche la situation est simple: à Nice le total gauche ces dernières années se situe  entre 13 % (Les régionales catastrophiques de 2021) et 28% (La présidentielle de 2022). Sur les scrutins avec des personnalités locales (Départementales de 2021 et législatives de 2022) le score se situe à un étiage de 23-25%. Aux municipales de 2020, dans le contexte très particulier de la crise de la Covid (Plus de 70% d’abstentions), le cumul gauche dépassait les 26% dispersés sur trois listes. En 2026, répéter le scénario de 2020 peut tout simplement signifier la disparition totale de la gauche et de l’écologie du conseil municipal et du conseil métropolitain (6).

Rassemblée, peut-elle espérer l’emporter ? Pour cela il faudrait un alignement de planètes assez exceptionnel: une droite et son extrême divisées qui se neutralisent, une gauche rassemblée qui gagne pas moins de 10 points sur les derniers scrutins. Compliqué… mais ce n’est pas impossible.

Elle peut aussi espérer faire un score qui lui permette de siéger avec une représentation plus forte au sein du conseil municipal et surtout de la Métropole ou seule Nice peut envoyer des conseillers métropolitains d'opposition (7).

Mais pour y parvenir, il ne faut pas y aller avec une vision étriquée du rassemblement. À lire quelques déclarations, la volonté existe chez certains d'essayer de reproduire les schémas à l'ancienne, du style gauche plurielle. Le fiasco des Régionales de 2021 devrait nous vacciner contre cette tentation. 

A Nice, la situation de 2026 n'est plus celle de 2001 où la gauche avait largement profité du rejet de Jacques Peyrat et de la profonde division de la droite locale. Depuis, EELV, le PS et le PC se retrouvent avec des effectifs militants très faibles et âgés. Dans le paysage local, de nouvelles forces émergent: il y a LFI qui commence à s’implanter véritablement. 

Il y a le rassemblement citoyen VIVA, initié à l’occasion des municipales de 2020. Un rassemblement qui a réussi à poursuivre son action et à exister au-delà de cette échéance ponctuelle de 2020.  Alchimie heureuse qui mêle des militants de tous les horizons de la gauche. Sans élu, VIVA a réussi à  marquer le débat local sur des questions fortes et à initier plusieurs campagnes importantes (Encadrement des loyers, gratuité des transports…).

En 2026 l'enjeu pour la gauche c'est de franchir le cap du premier tour et d’incarner une alternative possible à la droite et à l’extrême droite, avec des propositions fortes qui marquent une rupture; il en est ainsi de la gratuité des transports en commun,  de l’ambition de faire respecter la possibilité pour celles et ceux qui travaillent et vivent à Nice de pouvoir espérer accéder à un logement, de remettre en cause les projets qui ne tiennent pas compte de l’impact du dérèglement climatique, de rompre avec les logiques où la seule priorité est de faire de ce territoire un terrain attractif pour les actionnaires.

Incarner une alternative possible c’est aussi mobiliser les couches les plus populaires. Celles qui s’abstiennent très fortement, à l’exception de l’élection présidentielle.  Un défi pour l’ensemble des forces de progrès. Un défi pour ne pas voir la droite et son extrême poursuivre la mise en coupe réglée de notre ville. 

Robert Injey

 

(1): L’observatoire des inégalités a déterminé des seuils de niveaux de vie (Chiffres arrondis à la centaine supérieure)  Pour un couple sans enfant, 1500 euros (revenu mensuel après impôts et prestations sociales) c’est le seuil de pauvreté. Entre 1500 et 2300 euros ce sont les classes populaires. De 2300 à 4200 les couches moyennes. Au-dessus les couches aisées avec un seuil de richesse à partir de 5800 euros   

(2): Concernant le Paillon il est assez significatif que le dernier PPRI (Plan Prévisionnel des Risques d'Inondation) date de …1999. 

(3): Propos attribués à Madame de Pompadour qui désirait remonter le moral de Louis XV, après le désastre de la  bataille de Rossbach

4) Soupçons d'irrégularités concernant le grand prix de France au Castellet; affaire Iconic; affaires liées à la reconstruction des vallées après la tempête Alex; affaire du Nice Climate Summit de 2023….

(5): A minima quatre «espaces» vont être livrés et inaugurés  au fur et à mesure, à partir de la mi 2024: l’esplanade de la Bourgada, le jardin Sosno avec les transformations de la Bibliothèque Louis Nucéra, l’esplanade de Lattre de Tassigny et enfin la forêt urbaine sur l’emplacement d’Acropolis.

(6): La liste de Governatori réussit à se maintenir au second tour pour 776 voix.  Le score de 11,30% doit beaucoup aux dizaines de milliers d'euros que JM Governatori a mis dans cette campagne, lui permettant, par exemple, d'embaucher des dizaines de CDD pour mener campagne… 

(7): Actuellement sur 132 membres du Conseil métropolitains la gauche n’est représentée que par 3 élus EELV de la ville de Nice…

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