A quoi je vais penser dimanche avant de voter?
- Au candidat du RN qui a agressé ma camarade, Marie-Chantal, vendredi soir dernier à Grasse ?
- Aux nazillons qui ont tenté d'agresser des féministes au départ de la manif «Toutes aux frontières le 5 juin à Nice»?
- Aux centaines de victimes des idéologies racistes?
- A cette histoire, oubliée, des meurtres racistes, qui auront fait au moins 15 morts et des centaines de blessés parmi les nord-africains, entre l’été et l’automne 73 dans la Région de Marseille et en France ?
- A mon cousin, «condamné à mort» par l’OAS?
- A mon grand-père, dénoncé par une fasciste française en mars 1944, arrêté chez lui devant les yeux de ma mère et de mon oncle, âgés de 6 et 8 ans à l’époque? Il a pu éviter la prison, ou pire encore, au seul fait qu’il a eu affaire ce jour là à un officier de la Wehrmacht et pas à la milice.
Je vais sans doute penser à tout cela, et au fait, aussi, que je n’ose imaginer un Vardon et un Tivoli en vice-présidents de la Région PACA.
Beaucoup de femmes et d’hommes de gauche sont fatigués, surtout dans notre Région, de devoir, trop souvent, voter à droite pour éliminer l’extrême droite. C’est vrai que la lassitude est grande. Je le comprends.
Elle est aussi grande que celle d’un gardien d’une digue qui doit inlassablement reconstruire celle-ci, sans cesse détruite par une mer déchaînée.
Car c’est bien la situation où nous sommes. Ce n’est pas le Front républicain qui faiblit, c’est la gangrène des idées d’extrême droite qui, petit à petit, gagne du terrain. La polémique autour de la participation de leaders de gauche à la manif du 19 mai en est l’illustration.
Alors, sauf à tout abandonner et laisser la digue sauter, il nous faudra, pour éviter le chaos, encore, inlassablement, la reconstruire demain comme hier.
Quant à nos états d'âme de devoir voter à droite, là encore je pense à mon grand-père. Des états d'âme il en du en avoir après avoir abattu plusieurs allemands, le 28 août 44, à Nice à l’angle Pessicart/ Gambetta. A côté mettre un bulletin de vote dans l’urne c’est bien peu de chose, non?
Et que sont nos états d'âme par rapport aux souffrances de celles et ceux qui ont eu à subir le fascisme?
il ne faut pas perdre les sens des priorités et des urgences. Et dans cette affaire il ne s’agit pas de «faire plaisir à la droite», ou bien encore que le «front républicain se mérite» ou je ne sais quoi encore. Il s’agit simplement, et une nouvelle fois, de faire barrage à la peste brune. Ni plus ni moins.
Donc dimanche, je n’aurai pas d’état d'âme: je voterai Muselier/Estrosi et dès lundi je reprendrai la bataille politique contre leur politique.
Viendra aussi le moment de tirer sereinement le bilan de cette séquence et de voir comment nous pouvons faire autrement pour ne pas nous retrouver systématiquement dans cette situation. Mais ça, c’est pour après le vote de dimanche. A chaque jour sa peine...
Robert Injey