" />
Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Robert Injey

Blog personnel sur l'actualité politique à Nice et en France

La seule alternative, le Front de Gauche et JL Mélenchon (The Guardian)!!

Publié le 12 Avril 2012 par Mark Weibrot in Politique France

Publié mardi 10 avril sur le site internet du quotidien anglais The Guardian, l’article de Mark Weibrot dresse le portrait d’un Jean-Luc Mélenchon et d’un Front de gauche seuls à proposer une alternative plus progressiste que l’austérité promise par d’autres. Et de constater que « dans la course à l’Elysée, il semble être le seul à comprendre les choix économiques réels qui s’offrent à la France et à la zone euro ».

Le président conservateur français Nicolas Sarkozy s’est présenté en 2007 avec pour objectif de faire ressembler l’économie française à celle des États-Unis d’Amérique. Le moment était mal choisi : les États-Unis étaient alors au bord de la pire récession de leur histoire depuis la Grande Dépression, et allaient plomber l’économie de l’Europe ainsi que celles d’une grande partie du reste du monde en même temps que la leur. Les États-Unis ayant connu quatre année de croissance quasiment nulle, il refuserait probablement d’admettre tout cela.

Toutefois, Sarkozy a bel et bien réussi, d’une certaine manière, à américaniser l’économie française. Après avoir été l’un des rares pays à hauts revenus à n’avoir pas connu d’augmentation des inégalités entre le milieu des années 1980 et le milieu des années 2000, les inégalités en France ont augmenté depuis l’élection de Sarkozy. Le rapport entre les revenus du 99e centile (ceux des 1% les plus riches, en haut de l’échelle) et ceux du 1er centile (en bas) est passé de 11.8 à 16.2. D’autres indicateurs d’inégalité ont aussi augmenté sensiblement. Ainsi, le coefficient de Gini est passé de 26,6 à 29,9. Ce changement a eu lieu entre 2007 et 2010 ; la situation est probablement pire aujourd’hui.

En relevant l’âge de départ en retraite par une réforme sans nécessité aucune qui déclencha une forte opposition et de nombreuses vagues de protestation, Sarkozy a ouvert la voie à une France plus inégalitaire encore pour les années à venir.

La comparaison entre la France et les États-Unis est pertinente car les deux pays ont à peu près le même niveau de productivité, en production par heure travaillée.En d’autres termes, les deux pays ont la capacité économique de bénéficier à peu de choses près du même niveau de vie. Les Français ont choisi de bénéficier des gains de leur productivité sous la forme d’une réduction du temps de travail, de vacances plus longues, d’une couverture maladie universelle, de l’accès gratuit à l’université et aux services de garde d’enfants, ainsi que d’une plus grande égalité dans la redistribution des revenus. A l’inverse, aux États-Unis, plus de 60% de la progression des revenus de ces trente dernières années ont profité au 1% des plus riches. La pauvreté est à présent revenue au niveau de celle de la fin des années 1960 ; les frais d’inscription à l’université ont augmenté en flèche ; la loi ne prévoit pour nous aucun congé payé, et 52 millions d’américains demeurent sans assurance de santé (ce chiffre pourrait diminuer dans les années à venir, mais cela dépendra en partie de la Cour Suprême).

La plupart des citoyens français tiennent à cette sécurité économique et à cette façon de partager les fruits de la prospérité. L’on peut donc s’étonner qu’un homme avec un programme comme celui de Sarkozy ait tout simplement pu être élu, et puisse avoir des chances de l’être à nouveau. Cette situation s’explique par un malentendu de l’opinion sur les questions économiques les plus importantes, malentendu entretenu et encouragé par une couverture médiatique défaillante.

Comme en 2007, la sagesse populaire voudrait que la France ait vécu au-dessus de ses moyens, et Sarkozy prévient à présent que la France pourrait bien devenir la nouvelle Grèce et affronter une débâcle économique s’il n’était pas réélu. Il s’engage donc à rééquilibrer le budget national du pays d’ici à 2016.

Malheureusement, son rival du Parti Socialiste, François Hollande, promet l’équilibre budgétaire d’ici à 2017. Il y a bien entendu des différences de taille entre les deux hommes, mais si l’un ou l’autre de ces candidats venait à appliquer un programme d’austérité budgétaire d’une telle ampleur, à un moment où les économies française et européenne sont si faibles, il est quasiment certain que le chômage et bien d’autres problèmes économiques ne pourraient que s’aggraver. La France perdrait alors certains de ses nombreux acquis sociaux et économiques.

Fort heureusement, la France dispose d’une alternative plus progressiste : elle s’incarne en la personne de Jean-Luc Mélenchon, porté par le Front de Gauche. Dans la course à l’Elysée, il semble être le seul à comprendre les choix économiques réels qui s’offrent à la France et à la zone euro. La France n’a nullement besoin d’une cure d’austérité, qui serait pour le coup l’assurance de voir la France finir comme la Grèce. Au lieu de cela, Mélenchon propose que la Banque Centrale Européenne fasse son travail, c’est-à-dire qu’elle prête au taux de 1% à la France et aux autres gouvernements européens, comme elle le fait auprès des banques. Le poids du service de la dette française, d’environ 2,4% du PIB est encore assez raisonnable. Si la France peut continuer à emprunter à faible taux, elle pourra se sortir de ses problèmes actuels, tout en créant de l’emploi et en augmentant les revenus. Cela relève du bon sens macroéconomique.

Mélenchon veut aussi réduire le temps de travail, augmenter le salaire minimum et augmenter les impôts pour les plus riches. Il rejette l’absurdité de l’équilibre budgétaire, comme la plupart des économistes aux États-Unis, et fustige le fait que la Banque Centrale Européenne ne s’engage pas pour le plein emploi. Cet argument est pertinent d’un point de vue économique quand, notamment en période de récession, la BCE peut créer de la monnaie (comme l’a fait la Réserve Fédérale Américaine, en créant 2.3 milliards de dollars en 2008) sans craindre une inflation excessive.

Mélenchon veut aussi faire sortir la France de l’OTAN. Ce serait là une très bonne chose pour la France mais aussi pour le monde. Initialement, l’OTAN a été créée pour former un contrepoids à l’Union Soviétique qui, au cas où certains ne l’auraient pas remarqué, n’existe plus. Les Américains n’ont plus besoin d’ « alliés » qui aident nos gouvernements à occuper d’autres pays comme l’Irak ou l’Afghanistan, ou à entamer une autre guerre dangereuse et déraisonnable, comme nous semblons nous apprêter à le faire en Iran.

Les deux finalistes se retrouveront lors d’un deuxième tour si aucun d’eux n’obtient de majorité au premier tour le 22 avril, ce qui paraît le plus probable. Mélenchon tourne autour de 15 % dans les sondages, mais il se situerait encore plus haut sans la crainte de le voir éliminer le candidat socialiste du second tour. C’est ce qui s’est produit en 2002, quand le candidat d’extrême-droite anti-immigration est arrivé en deuxième place. Les chances que ce scénario se répète cette année sont faibles. Marine Le Pen n’est qu’à 13% dans les sondages. Il est clair que quiconque souhaitant préserver le mode et le niveau de vie français devrait choisir Mélenchon.

Par rapport aux États-Unis, il est beaucoup plus facile pour le candidat d’un troisième parti en France d’avoir une influence significative, même sans remporter l’élection. Hollande a déjà orienté son discours plus à gauche afin de capter les voix du Front de Gauche, et Mélenchon aura de quoi négocier avant de soutenir la candidature Hollande au second tour. Alors que les deux grands partis se font fort de mettre en place des politiques économiques qui diminueront le niveau de vie des Français – quand en 2007, seul Sarkozy s’engageait dans cette voie – l’on peut difficilement envisager de moment plus opportun pour voter « en dehors des sentiers battus ».

Mark Weisbrot est co-directeur du Centre de Recherche en Politiques Economiques (Center for Economic and Policy Research) de Washington D.C. Il est également président de l’organisation « Pour une Politique Etrangère plus juste » (Just Foreign Policy ; www.justforeignpolicy.org)

Commenter cet article