L’expression est célèbre, reprise par Coluche pour se moquer des discours des bien-pensants.
La volonté de stigmatiser les classes populaires ne date pas d’hier. En 1838, l’Académie des sciences morales et politiques lançait un appel à contribution avec pour objectif : « Rechercher d’après des observations positives quels sont les éléments dont se compose cette partie de la population qui forme une classe dangereuse par ses vices, son ignorance et sa misère ; indiquer les moyens que l’administration, les hommes riches, les ouvriers intelligents et laborieux pourraient employer pour améliorer cette classe dangereuse et dépravée. »
Aujourd’hui, près de deux siècles après, la volonté de stigmatisation est toujours la même. Accusés de tous les maux, les « aides sociales coûtent un pognon de dingue » pour le Président Macron, « ils ne nourrissent pas leurs enfants mais ont le dernier smartphone » pour un ancien adjoint d’Estrosi, sans parler de l’inénarrable Éric Ciotti qui a fait de la chasse aux pauvres, fraudeurs par nature dans son esprit, son « combat ».
Ce mépris de classe on le retrouve à l’égard des Gilets jaunes, on le retrouve ces jours-ci à l’égard des mobilisations sociales actuelles. Des manifestants accusés de vouloir conserver leurs « privilèges ». Imaginez, ils osent réclamer de pouvoir partir à la retraite en bonne santé pour en profiter un peu !
Et à l’heure où les bien-pensants argumentent sur le recul de l’âge de la retraite au nom de l’augmentation de l’espérance de vie, osons leur rappeler une autre vérité. L’espérance de vie en bonne santé à la naissance, en France, s’établissait en 2016 à 62,6 ans pour les hommes et 64,1 ans pour les femmes.
10 ans après l’appel à contribution lancé par l’Académie des sciences morales et politiques, Marx et Engels publiaient le Manifeste avec, dans les premières lignes, ces passages qui sont d’une criante actualité : « L’histoire de toutes sociétés jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire de la lutte des classes (....) une guerre ininterrompue, tantôt ouverte, tantôt dissimulée... »
En France, comme dans beaucoup de pays à travers la planète nous sommes dans une phase ouverte de cet affrontement.
Robert Injey