La question de la gratuité des transports connaît une évolution intéressante.
La première évolution c’est que, depuis le 21 décembre, une métropole de près de 500000 habitants, celle de Montpellier, a fait le choix politique de passer à la gratuité. Une décision forte pour lutter contre le dérèglement climatique en réduisant l’usage de la voiture. C’est aussi une mesure démocratique et sociale importante : elle concerne tout le monde.
La seconde évolution est marquée par deux faits, au dernier trimestre 2023, passés assez inaperçus. Deux faits qui marquent un tournant sur une question essentielle: celle du financement de la gratuité.
Depuis des années le rassemblement citoyen VIVA! avance des propositions pour financer non seulement la gratuité mais aussi le développement du réseau. Au cœur de ces propositions, deux idées : aligner le taux du versement mobilité (1) sur celui de l’Ile de France et augmenter la faible taxe de séjour versée pour chaque nuitée par les touristes.
Première surprise, dans une tribune publiée dans le Monde, le 5 septembre dernier, plusieurs président·es de métropole, dont Christian Estrosi, demandent… le déplafonnement du taux du versement mobilité pour financer les transports en commun.
Seconde surprise, dans la loi de finances pour 2024 on découvre une mesure nouvelle pour financer là aussi les transports en commun: le triplement de la taxe de séjour sur le périmètre de l’Ile de France.
Si ces mesures étaient appliquées sur la Métropole Nice Côte d’Azur cela pourrait avoir l’impact suivant:
Actuellement le versement mobilité rapporte 94 millions d’euros à la Métropole. Si nous alignions le taux actuel (2%) sur celui de Paris et des départements limitrophes (2,95%) nous pourrions récupérer 47 millions d’euros supplémentaires.
Concernant la taxe de séjour, elle rapporte 14 millions. Son triplement permettrait, potentiellement, à la Métropole de récupérer 28 millions d’euros supplémentaires.
Si nous totalisons l’ensemble de ces deux mesures, (47 + 28), ce n’est pas moins de 75 millions d’euros supplémentaires en recettes.
75 millions qui compensent largement la perte de la billetterie (2) et permettent de financer le renforcement du réseau.
75 millions c’est bien peu par rapport aux millions d'heures perdues dans les embouteillages sans parler du surcoût de consommation en carburant que cela induit. Une récente étude considérait que ce surcoût causé par les embouteillages s'élevait à 144 euros en 2023 pour les Niçoises et les Niçois, sans compter l’impact de la pollution...
Face au dérèglement climatique et à l’explosion des inégalités, le choix de la gratuité est un choix politique d’avenir.
Monsieur Estrosi, sur Nice et la Métropole, qu’attendons nous pour y réfléchir sérieusement ?
Robert Injey
(1): Les employeurs des secteurs public et privé qui emploient 11 salariés et plus dans le périmètre d'une autorité organisatrice de la mobilité où a été institué le versement mobilité sont assujettis à la contribution versement mobilité.Cette contribution destinée à financer les transports en commun est recouvrée par les Urssaf qui sont chargées de la reverser aux autorités organisatrices de la mobilité.
(2): Pour la Métropole Nice Côte d'Azur les recettes de billetterie représentent (hors Covid) 50 millions d’euros.