Derrière le score du FN se cache une autre réalité. Celle d’un vote qui change, se transforme. Catalogué longtemps comme un vote de colère, un vote défouloir pour l’électorat populaire, le vote FN tend à devenir de plus en plus un vote d’adhésion au sein de la bourgeoisie.
Si on compare le résultat du premier tour des Régionales avec le niveau, très haut en voix, de la présidentielle on constate deux choses :
- D’une part la très grande mobilisation de l’électorat de l’extrême droite pour ce scrutin intermédiaire. Malgré une abstention qui est plus importante de 30 points (49,91% contre 20,52% au premier tour de la présidentielle) le FN retrouve 6 millions de voix sur les 6,4 de la Présidentielle.
- D’autre part il existe des endroits où le FN gagne même en voix. Ces endroits ne doivent rien au hasard ! A Nice, il s’agit des bureaux de Gairaut, Rimiez, col de Villefranche, Maeterlinck, St Roman de Bellet. Dans le département, il s’agit des communes de St Jean Cap Ferrat, Eze, Opio. Au plan national nous retrouvons le même phénomène à Neuilly sur Seine ou bien encore dans le XVIe arrondissement de Paris.
Et sur ce point, la progression n’est pas à la marge. Sur 2012 le FN gagne en voix, +37% de voix à St Roman de Bellet, +40% à Opio, +25% à Neuilly sur Seine ou bien encore +20% dans le XVIe.
A l’inverse, tout en conservant un fort niveau, la mobilisation de l’électorat FN est moindre dans les quartiers très populaires. Surtout il n’y gagne pas de voix, il en perd même : - 30% sur l’ensemble des bureaux de l’Ariane, -15% sur les bureaux du quartier St Roch.
Face à ces résultats et au glissement massif vers le FN d’une part de l’électorat de la bourgeoise, sans doute aussi de la grande bourgeoisie, on comprend mieux l’intervention de Pierre Gattaz dans la campagne sur le programme économique du FN. Sa déclaration provocante ne s’adresse pas aux couches populaires mais bien à la bourgeoisie : « Je dis attention, car il (le programme économique du FN) me rappelle étrangement le programme commun de la gauche de 1981 »
Cette évolution électorale, croisée avec les enquêtes sortie des urnes (1) laisse apparaître clairement que le vote FN est ancré (plus de 70% des électeurs FN ont décidé de leur vote plus d’un moins avant le scrutin), et si il comporte une forte proportion de motivations protestataires, il est de plus en plus un vote d’adhésion autour des thématiques de la sécurité, de l’immigration ou bien encore de la fiscalité.
Vote motivé de la bourgeoisie, le vote FN est plus que jamais une menace démocratique et sociale.
Robert Injey
(Article pour le Patriote n° 113 du 11 décembre 2015)
- : Etude Harris Interactive pour M6, 6 décembre 2015, échantillon de 4024 personnes