Hier, ils étaient bradés à la découpe au privé lucratif, démantelés, méprisés. Aujourd’hui, en cette période de crise profonde, nos gouvernants en viennent à redécouvrir toute la nécessité de véritables services publics qui privilégient l’intérêt général aux intérêts privés et à la recherche de la rentabilité à court terme. Quelques jours encore avant le déclenchement du confinement, la direction du CHU de Nice tentait d’obtenir la fermeture de nouveaux lits au nom d’une rentabilité morbide. Depuis, la pandémie est là, le confinement généralisé et ceux dont hier encore on prévoyait de supprimer les postes (plus de 20 000 en quelques années) sont célébrés chaque soir aux fenêtres et aux balcons de tout le pays. Cette catastrophe attendue permet malheureusement de mesurer l’impact chaotique des économies imposées au nom du respect des critères sur les déficits budgétaires : sous-équipement en matériel de première urgence, nécessité de rappeler les retraités, et levons l’omerta sur la recherche publique, ce parent pauvre véritablement asphyxié financièrement pendant des années et dont maintenant on attend des miracles.
Cette crise révèle les failles d’un système qui est tourné exclusivement vers le profit maximum. Et comme chaque fois, en temps de crise, après avoir privatisé les profits, on socialise les pertes. La Bourse ne s’y trompe pas quand elle repart à la hausse. L’anticipation de l’accord de relance portant sur 2 000 milliards aux États Unis, a propulsé mardi l’indice Dow Jones de plus de 11 % en une seule séance, un record depuis 1933…
Passée la pandémie il faudra remettre bien des choses sur l’ouvrage. Déjà fortement menacées par les conséquences du réchauffement climatique, nos sociétés ont été fragilisées par la soumission d’une très grande partie des politiques aux exigences des marchés financiers. Que cette crise puisse aider le plus grand nombre à comprendre que demain ne pourra plus se construire sur les mêmes bases qui nous sont imposées depuis des décennies.
Robert Injey