Depuis quelques semaines le monde médiatico-politique s’enflamme et des universitaires se mobilisent. Des membres du gouvernement, reprenant une expression issue des bas-fonds de l’extrême droite, ont trouvé un nouvel ennemi.
En octobre le ministre de l’Éducation nationale dénonce « l’islamo-gauchisme (qui) fait des ravages à l’université ». Le 16 février la ministre des universités, Frédérique Vidal, déclare vouloir « ouvrir une enquête sur l’islamo-gauchisme à l’université » et annonce avoir demandé au CNRS « un bilan de l’ensemble des recherches » qui se déroulent en France, « afin de distinguer ce qui relève de la recherche académique et ce qui tient du militantisme », invoquant comme argument que « l’islamo-gauchisme gangrène la société dans son ensemble et l’université n’est pas imperméable ».
Les présidents d’Université, dans une rare unanimité, dénoncent « une nouvelle polémique stérile », pointant au passage que « l’expression n’est pas un concept. C’est une pseudo-notion dont on chercherait en vain un commencement de définition scientifique ». Face à ce qui relève d’une véritable chasse aux sorcières à l’université, des voix s’élèvent, de plus en plus nombreuses, pour demander la démission de la ministre. Une pétition lancée par 600 universitaires recueille d’ores et déjà plus de 20 000 signatures au sein du monde universitaire.
Une question s’impose : pourquoi des membres du gouvernement se sont embarqués dans cette aventure nauséabonde ? Pourquoi relayer de manière aussi honteuse une terminologie en vogue dans quelques milieux fascisants ? Une extrême droite qui est coutumière du fait. Autre temps, mais même méthode, il y a une époque où l’ennemi c’était le judéo-bolchevisme, lui aussi accusé des mêmes maux.
Le seul exemple des actions de solidarité qui se multiplient pour permettre aux étudiants privés de ressources de pouvoir simplement manger, illustre la difficulté du gouvernement à gérer la pandémie et ses conséquences. Incapables de répondre à la détresse du monde enseignant et à celle de centaines de milliers d’étudiants, ces membres du gouvernement pensent sans doute avoir trouvé le nouvel ennemi extérieur pour détourner l’attention et diviser un peu plus les classes populaires. Aller chasser sur les terres de l’extrême droite semble être devenu une ligne politique pour ce gouvernement. La prestation de Gérald Darmanin face à Marine Le Pen a fait faire à l’animateur du débat sur France 2 ce constat : « Vous êtes d’accord sur tout, tous les deux ? » À défaut de bilan, incapable de faire face à la crise sanitaire, multipliant les couacs (cf l’affaire des vaccins), empilant les mesures sans même en mesurer efficacité (cf le confinement les week-ends) ce gouvernement patauge et cherche à s’en sortir. Quitte pour cela à se vautrer dans la mare infecte des idées de l’extrême droite.
Stigmatiser et diviser semble devenir la seule préoccupation d’un pouvoir qui s’inquiète à 14 mois de l’élection présidentielle.
Robert Injey