Depuis des semaines la classe politique s’affole. Le scénario «plausible» pour 2022 est en train de s’effondrer pour laisser place à un autre cauchemar. Sans doute pire, celui-là
Omniprésent sur Cnews depuis de années, monté en épingle par des leaders de la droite, à l’image de Laurent Wauquiez qui le recevait avec le tapis rouge au siège de LR, ses déclarations n’ont cessé d’être reprises par des élus de droite en quête d’une radicalité malsaine. Testé dans des premiers sondages à 5-7% au début de l’été, il est à 10% à la mi-septembre et 15% à la fin du mois. Une progression très rapide, assez peu fréquente, qui laisse beaucoup de commentateurs sans voix.
Surprenante par sa rapidité, l'émergence du polémiste d’extrême droite n’en est pas si étonnante que cela.
Trois phénomènes nourrissent la poussée de Zemmour.
D’une part, il y a une profonde droitisation de la société française depuis plus de 10 ans. Les renoncements sur les ambitions sociales d’un côté, les reprises des thématiques de la droite extrême de l’autre (n’est-ce pas M. Valls?), n’ont cessé de déplacer le curseur du débat politique de plus en plus vers la droite extrême.
D’autre part, E. Zemmour pointe, habilement, l’échec du RN. A quoi cela sert-il d’être au second tour de la présidentielle si après c’est pour ne rien gagner ? Et de fait, le bilan de Marine Le Pen est bien maigre: une seule ville de plus de 100 000 habitants (Perpignan), aucun département, aucune région.
Enfin, alors même que certaines de ses déclarations sont aussi nauséabondes que celles de Jean- Marie Le Pen, il capte un électorat de droite que n’a jamais capté le FN. Illustration de cette réalité, la déclaration d’un Eric Ciotti qui préfère voter Zemmour que Macron. Dans les faits, les enquêtes d’opinion relèvent qu’un quart des électeurs de Fillon s'apprêtaient à voter Zemmour. Après avoir vidangé l’électorat de Dupont-Aignan, une partie de LR, il a encore des marges significatives du côté des électeurs de Marine Le Pen, pouvant potentiellement lui ouvrir les portes d’un second tour.
A écouter le personnage déverser sa haine, on ne peut s'empêcher de penser, dans un style certes très différent, à Donald Trump. Pour l’un et pour l’autre, pour de nombreux électeurs et électrices peut importe la réalité de leurs arguments, peu importe leur incompétence sur un grand nombre de dossiers, il suffit qu’ils stigmatisent l’étranger, qu’ils jouent sur les peurs et attisent les pires réflexes identitaires de leur électorat.
En politique, malheureusement le pire est toujours possible. La France dans son histoire en a déjà fait la triste expérience. Faisons en sorte qu’il en soit autrement en 2022.
Robert Injey