Le décès du père Buannic suscite de l'émotion chez celles et ceux qui ont eu la chance de le connaitre. Ci-dessous l'article paru dans l'Humanité lundi 21 janvier.
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Yves Buannic, « l’enfant du large », est mort. Fondateur de France-Amérique latine et d’Enfants du monde, cet ancien de la marine a sillonné la planète avec pour boussole la solidarité.
En 2007, Yves Buannic s’était livré, dans l’Enfant du large, à une rétrospective de son singulier parcours. Ancien marin devenu prêtre, il était connu pour son militantisme humaniste sans frontières : Afrique du Sud, Brésil, Cuba, Nicaragua, Haïti, Palestine, Cambodge, Vietnam, Birmanie, Irak, Liban. Il a fait de sa vie un combat au service des autres, et particulièrement des enfants. Yves Buannic est mort, le 14 janvier, à l’âge de quatre-vingt-six ans. Ses obsèques ont eu lieu jeudi, à Paris.
Issu d’une famille bretonne, humble et pauvre, pupille de la nation, il s’engage comme mousse dans la marine nationale à l’âge de quatorze ans. « La marine, c’était la porte de sortie vers le monde, le grand large, la seule issue pour quitter mon milieu », écrira-t-il dans son autobiographie. Il naviguera à travers le monde pendant près de deux décennies. En Indochine, lors d’un de ses voyages, il découvre sa vocation, et devient prêtre, à Paris, à quarante-trois ans. Dans la capitale, justement, où la spéculation immobilière fait rage, il lutte contre les expulsions des familles pauvres, en fondant l’association Les enfants du Marais.
« J’ai été révolté par l’injustice. J’ai donc ressenti le devoir impératif de rejoindre diverses organisations laïques pour construire un monde plus juste, plus vrai et plus fraternel. » Il met les voiles, cap sur la solidarité. Ce curé anticonformiste est l’un des premiers à dénoncer le génocide au Cambodge. Président de France-Amérique latine, il milite également au sein de l’association France-Palestine, et adhère à la Rencontre nationale contre l’apartheid en Afrique du Sud. En 1985, Yves Buannic fonde l’association Enfants du monde-Droits de l’homme, qu’il présidera, puis animera jusqu’à la fin de ses jours. « L’enfant est l’avenir de l’humanité. Faisons qu’il soit aussi son présent ! »
À Van Canh, dans la presqu’île vietnamienne de Gamao, il construit, avec son organisation, un village de la solidarité pour les enfants victimes de l’agent orange. On le retrouve au Brésil, dans les favelas, où il dénonce les assassinats des gamins des rues. En 2003, il part en Irak à la veille du déclenchement de la guerre. « Invité de la semaine » dans nos colonnes, il dénonce : « Cette guerre a été un échec pour toute l’humanité. (...) Qui prétend avoir gagné sur les décombres d’un pays ensanglanté. Le “V” de la victoire ne sera vrai que si l’équité, la dignité, la vérité, la justice, la fraternité, la tolérance deviennent chemin d’humanité. »
Il officiera aussi à Bon Voyage à Nice, où il travaillera, entre autres, avec les conseillers généraux communistes, Charles Caressa et Jacques Victor. Yves Buannic a définitivement mis les voiles vers Penmarch où il a été inhumé. Mais les paroles du curé rebelle résonnent : « Ne baissons surtout pas les bras, en nous laissant chloroformer les consciences par les mensonges planétaires. »