Ci-dessous l'article du Patriote de ce vendredi sur le nouveau découpage des cantons dans les Alpes-Maritimes...
Ce que cache le nouveau découpage
C’est fait. En invitant le conseil général à donner un avis, dans les prochaines semaines, sur le nouveau
découpage des cantons, le Préfet vient mettre un terme à un suspens qui agite le monde politique.
En exclusivité, un premier décryptage du Patriote Côte d’Azur
Outre la volonté de réduire le nombre de cantons dans le cadre des réformes en cours, ce nouveau découpage répond à la nécessité de mettre fin aux déséquilibres démographiques entre cantons. En effet la situation existante est ubuesque. Le Président du Conseil général est élu dans un canton qui, en 2011, comptait 1457 inscrits, alors que le Président du groupe communiste, Jacques Victor, est élu dans un canton de 21 373 inscrits. Un rapport de 1 à 15, qui monte même de 1 à 22 dans le canton de Mougins !
Le nouveau découpage ramène ce déséquilibre à un rapport, plus raisonnable, de 1 à 1,5.
Conséquence immédiate : la très forte réduction du nombre des cantons du moyen et du haut pays. D’une quinzaine de cantons nous passons plus qu’à trois cantons de montagnes, Contes avec la Roya, Tourettes Levens qui intègre les vallées de la Tinée et de la Vésubie et Vence qui s’étend jusqu’à Guillaumes…
Si les considérations démographiques prédominent dans la fusion des cantons du haut et du moyen pays, sur le littoral, les motivations sont exclusivement politiques.
La tentation est grande pour chaque majorité en place d’effectuer un découpage électoral qui le favorise. Ce fut le cas avec l’UMP lors du redécoupage des circonscriptions législatives, c’est le cas aujourd’hui avec le découpage des cantons « made in PS ». Particulièrement sur Nice, objet de toutes les attentions socialistes et de son leader Patrick Allemand.
Les possibles retombées à Nice. A la lecture des propositions du ministère, force est de constater qu’elles épousent intégralement les préoccupations du PS. Une règle semble avoir prédominé dans ce découpage : conforter, par l’ajout des secteurs les plus favorables à la gauche, les cantons que le PS et ses proches détiennent encore (les actuels Nice 1 et Nice 5), détenaient (les actuels Nice 12 et Nice 14) ou pensent pouvoir gagner (l’actuel Nice 13) .
Ainsi, dans une volonté de pouvoir reconquérir le canton où était élu Paul Cuturello, le nouveau intègre l’actuel Nice 14 et celui de Carros, dont l’élu est Damiani.
L’actuel Nice 5, où est élu Patrick Mottard, se trouve quand à lui «conforté» avec une partie de Nice 11 où était élu le regretté Jean François Knecht. A l’Est de la ville, probablement dans la perspective de tenter de faire élire celui qui est, jusqu’à présent, annoncé comme le dauphin de P. Allemand, Xavier Garcia, à moins que cela ne soit Ladislas Polski son soutien indéfectible, un canton là encore sur mesure. Futur canton constitué de l’actuel Nice 13 (la Trinité, l’Ariane) étoffé du quartier populaire de Nice-Pasteur et, plus surprenant, de Cantaron aujourd’hui rattaché au canton de Contes. Bizarrerie du découpage, le regroupement de ce village au futur canton Nice 7 ne se justifie ni démographiquement ni géographiquement.
Enfin, là où le découpage électoral ressemble à un véritable charcutage c’est dans les quartiers St Roch-Riquier. Pour tenter de conserver le canton de Marc Concas et permettre, hypothétiquement, au PS de récupérer le canton perdu par P. Allemand, l’actuel canton Nice 3 où est élu Jacques Victor est purement et simplement coupé en deux.
Pour Jacques Victor ce charcutage marque la volonté du PS de faire tomber un élu «dont les critiques de l’actuelle gestion libérale de l’Élysée-Matignon sont bien connues et qui ne cesse de réclamer une réelle politique de gauche faite de justice, de progrès et de solidarité».
Pour Robert Injey, tête de liste du Front de gauche à Nice pour les prochaines échéances municipales « Le chantage était clair, ce charcutage est la réponse du PS au choix des communistes pour les prochaines municipales. Une mesquinerie qui vise à priver les habitants de Riquier-St Roch d’un élu connu et reconnu pour sa disponibilité, son action et sa présence sur le terrain » et l’élu communiste de poursuivre « tous les tripatouillages ne pourront masquer la déception et la colère de l’électorat de gauche face à la politique du gouvernement ».
A droite ce nouveau découpage va sans nul doute entrainer des « drames » liés à la réduction du nombre de canton. La parité étant très virtuelle à l’UMP, la réduction du nombre de cantons signifie autant d’élus hommes en moins (1) mais aussi des conflits à venir. L’un d’entre eux a déjà commencé à Nice. La fusion des actuels cantons Nice 4, où est élu A. Vérola, et Nice 8 avec O. Bettati n’est sans doute pas étrangère aux récentes prises de décisions de ce dernier. Pour survivre électoralement il a besoin d’exister.
Au final, le rapport gauche-droite ne devrait pas être sensiblement modifié dans ce département. Par contre il est très prévisible, qu’avec ou sans découpage, des élu-e-s d’extrême droite puissent faire leur entrée au conseil général. Pour le PS, malgré un découpage sur mesure, le gain de nouveaux élu-e-s est très hypothétique dans la situation politique actuelle. Concernant le Parti communiste et le Front de gauche le défi est de taille, mais pas impossible si la dynamique du Front de gauche continue à progresser.
Benjamin Richard
(1) Si le nombre de cantons passe de 54 à 27, le nouveau mode de scrutin prévoit la présentation de 2 candidats + 2 suppléants, donc l’élection de 2 élu-e-s par canton à parité. A l’arrivée il y aura donc pour 27 cantons, 54 élu-e-s et automatiquement 27 femmes contre 6 aujourd’hui