A chaque fois que notre territoire est touché par des intempéries entraînant des dégâts nous assistons à ce spectacle où chacun renvoie la responsabilité à l’autre. Ce fut le cas, par exemple, lors de la tempête Aline. Avec l'événement pluvieux qui a fait gonfler le Magnan, Christian Estrosi, comme quelques semaines plus tôt, David Lisnard, n’a pas manqué d'accuser Météo-France. Certes le démantèlement de Météo-France n’est pas sans conséquence sur la qualité de ce service public, mais il va bien falloir que les uns et les autres arrêtent de se renvoyer «la patate chaude» et agissent afin véritablement.
C’est le cas, en particulier, concernant le Paillon. Par chance, ces dernières années nous n’avons pas eu un épisode méditerranéen sur le bassin versant des Paillons (1) , à l’image de ce qui a pu se passer avec la tempête Alex sur les bassins versants de la Roya, de la Tinée et de la Vésubie.
Pour autant faut-il continuer à compter sur cette chance ?
Le risque concernant le Paillon existe, il a même été pointé par le maire de Nice lors d’un conseil municipal (2). Les services de l’Etat dans différents documents (3) vont plus loin en donnant des indications sur son impact sur la ville.
Et pourtant c’est l'immobilisme. Quatre exemples:
-Le maire de Nice, Christian Estrosi, à plusieurs reprises, a fait part du risque important pour le lycée Apollinaire, «qui n’aurait jamais dû être construit là». Mais qu’a fait le président délégué de la Région PACA, Christian Estrosi, pour que la Région agisse pour trouver une autre implantation pour le lycée? Quelle action a engagé l'État pour accélérer le déplacement ?
-Lors du conseil municipal du 13 octobre 2022 Christian Estrosi a évoqué le fait que le Palais des Expositions devrait lui aussi être déplacé en raison du risque de submersion mais qu'il était classé et que "chacun (l’Etat en l'occurrence) devra prendre ses responsabilités". Pourtant, dans le même temps, le maire de Nice prévoit de le transformer en Palais des Arts et de la culture pour un budget avoisinant les 100 millions d’euros. Cynisme ou irresponsabilité ?
-Le PPRI Paillon (Plan Prévention Risques d’Inondation) adopté le 17 novembre 1999, est le plus ancien du département, et si la Préfecture, par un arrêté préfectoral en date du 25 mars 2020, a lancé la révision de ce document, à ce jour rien n’a été publié, aucune consultation publique n'a été engagée. Où en sommes-nous aujourd’hui ? Faudra-t-il attendre une catastrophe?
-Il y a le PAPI (Programme d’actions de prévention des inondations) des inondations du bassin versant des Paillons pour les années 2013-2019, avec des actions sur lesquelles s’engagent communes, préfet, département et la Métropole…
Ce PAPI a été prolongé, mais à ce jour, sauf erreur, il n'y a rien de nouveau. Et pourtant ce PAPI programmait - à la charge de la ville de Nice- des actions indispensables comme, par exemple: la «réalisation d’un modèle numérique de la traversée de Nice (action n°4 –450 000 € HT)», ou bien encore, la «réalisation d’un schéma de maîtrise des ruissellements urbains (action n°21 - 400 000 € HT).
Où en sommes-nous de la réalisation de ces actions ? Où en sommes-nous de la réactualisation de ce PAPI ?
Avec l’impact du dérèglement climatique et la transformation du bassin méditerranéen en une «véritable marmite» (4), le risque d’un événement météorologique majeur sur le bassin versant des Paillons est d’une très grande probabilité dans les années à venir.
Aujourd'hui nous savons l'existence des risques, nous savons que le lit mineur du Paillon est là, en plein centre ville de Nice.
Maintenant il faut agir véritablement et arrêter de compter sur la chance…
Robert Injey
1/ Les Paillons forment un ensemble, il s'agit de quatre affluents (le Paillon de Contes, l'Escarène, la Banquière et le Laghet) qui forment le Paillon de Nice.
2/ Le 13 octobre 2022.
3/ A titre d’exemple: «EPRI (Evaluation Préliminaire des Risques d'Inondation un diagnostic préalable pour aller vers des choix partagés, première étape de la directive inondation» (Ministère écologie, développement durable 2011 avec un ajout en 2018). Dès 2011, ce document pointe qu’ « En l’espace d’un siècle (1868-1972) et au fil des projets urbains, le fleuve Paillon a été recouvert sur toute la traversée de la ville, et que le retour de crues exceptionnelles comme celles survenues en 1886 ou 1940 aurait des conséquences graves dans la cité. » (Partie X, page 535). Le même document pointe l’impact des inondations avec la notion EAIP, (Enveloppe Approchée des Inondations Potentielles). Pour la petite histoire, ce document ne pointait pas de risque d'inondation dans la Roya, à l’exception de Breil…
4/ Expression utilisée par le GIEC.